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l’articulation des droits d’auteur avec le code des marchés publics

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Comme le savent les lecteurs de ce blog, le Conseil d'Etat, à l'occasion d'un contentieux né des conditions de l'agrandissement du stade de la Beaujoire à Nantes, avait précisé "si en raison de la vocation d'un stade, l'architecte qui l'a conçu ne peut prétendre imposer au maître de l'ouvrage une intangibilité absolue de son oeuvre, ce dernier ne peut toutefois porter atteinte au droit de l'auteur de l'oeuvre en apportant des modifications à l'ouvrage que dans la seule mesure où elles sont rendues strictement indispensables par des impératifs esthétiques, techniques ou de sécurité publique, légitimés par les nécessités du service public et notamment la destination de l'ouvrage ou son adaptation à des besoins nouveaux".

Avec mes compères de droit commun Grom et Calamo , nous nous étions interrogés, entre autre, sur l'articulation des dispositions du code des marchés (de nature réglementaires) relative aux procédures de publicité et de mise en concurrence et celles du code de la propriété intellectuelle relatives au droit d'auteur (droit moral et droit patrimonial).

Le Conseil d'Etat, par une décision du 13 juillet dernier , vient justement de donner une réponse qui ne me semble pas claire du tout. Une chose est sûre : la conclusion d'un marché de prestation de service, tel un marché de maîtrise d'oeuvre, ne confère pas nécessairement à son titulaire des droits exclusifs pour modifier un projet.

En l'espèce, un préfet avait déféré la délibération de l'organe délibérant d'un syndicat d'agglomération confiant à un maître d'oeuvre pour la transformation, à l'intérieur d'un complexe sportif, d'une salle omnisports en salle polyvalente. En effet, le représentant de l'Etat reprochait au syndicat de ne pas avoir mené une procédure de publicité et de mise en concurrence, alors que l'établissement public, pour sa part, estimait que le maître d'oeuvre, qui était titulaire du premier marché pour la réalisation du complexe sportif, jouissait de droits exclusifs et devait nécessairement être choisi.

Tout dépend en réalité de l'option choisie par les parties. Le cahier des clauses administratives générales relative aux marchés des prestations intellectuelles comprend en effet plusieurs options, et les parties avaient choisi l'option B pour laquelle l'article B20 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles stipule que la personne publique ne peut utiliser les résultats, même partiels, des prestations que pour les besoins précisés par le marché.

Or, précise le Conseil d'Etat, "une telle clause, qui exclut la cession du droit patrimonial de reproduction, si elle faisait obstacle à ce que le SYNDICAT D'AGGLOMERATION NOUVELLE OUEST PROVENCE utilise les plans du complexe sportif pour l'édification d'un nouvel ouvrage sans l'accord du cabinet Triumvirat, n'interdisait pas au syndicat de modifier l'ouvrage réalisé à partir de ces plans en faisant appel à un autre architecte". La distinction est subtile. L'option B interdit d'utiliser les plans du complexe pour l'édification d'un nouvel ouvrage sans l'accord du titulaire, mais elle ne fait pas obstacle à ce ces plans soient utilisés, sans l'accord du titulaire du droit d'auteur, à modifier l'ouvrage réalisé et donc de transformer une salle omnisports en salle polyvalente.

Toutefois, le conseil d'Etat ajoute une limite de taille à cette possibilité. le maître de l'ouvrage peut modifier l'ouvrage réalisé, sans préjudice du droit moral du maître d'oeuvre au respect de son oeuvre. Ici, bien entendu, on en revient à la jurisprudence "stade de la Beaujoire" rappelé plus haut, où le maître de l'ouvrage ne peut porter atteinte au droit moral de l'auteur que dans des conditions très strictes. Il est clair que, dans ces conditions, à moins que les nouveaux travaux soient d'ampleur limitée, plutôt que de risquer d'être condamnées à payer des dommages intérêts, les collectivités publiques auront tout intérêt à confier la prestation intellectuelle au même cabinet, compromettant ainsi l'utilité de la procédure de mise en concurrence...


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